Érasme (1466-1536)
Humaniste éminent de son époque, il est notamment formé en grammaire, rhétorique, théologie, herméneutique, poétique, histoire ou encore philosophie morale. Contemporain d’Henri VIII, de Charles Quint et de François Ier, il reçoit d’eux divers avantages mais refuse d’être l’obligé d’un roi quelconque.
La vie de ce Néerlandais est marquée par la controverse car ses idées alimentent une réflexion globale sur la religion chrétienne. En effet, c’est en 1517 que Luther entame le mouvement dit du « protestantisme » en opposition avec une Église catholique jugée débauchée.
Pacifiste et défenseur du libre arbitre, Érasme offre une voie intermédiaire entre les pensées catholique et protestante. Sa pensée peut être articulée en trois axes : satisfaction des exigences chrétiennes, possibilité de vivre sa foi en tout lieu et intériorisation de la vie spirituelle.
Ses talents en langues anciennes, telles le grec et l’hébreux, et sa rigueur, font de lui un théologien reconnu, notamment en Angleterre. Sa formation complète lui permet d’exprimer sa pensée en mêlant les écritures bibliques et celles des pères de l’Église (Saint Paul, Saint Augustin et saint Jérôme) à des références aux auteurs grecs (Platon) et latins (Cicéron et Épictète).
Son texte le plus connu est l’Éloge de la folie (1511). Il y dénonce les excès et la luxure des rois, des paysans, des lettrés, des commerçants et des religieux en employant l’ironie et le paradoxe. S’y ajoutent, entre autres, le Manuel du chevalier chrétien (Enchiridion), les Adages et le Traité du libre arbitre.
Ce mélange de pensées païenne et chrétienne, ce syncrétisme, fait de lui l’un des meilleurs représentants de l’humanisme chrétien qui se développe après la période scolastique. Cette dernière s’était étalée du XIIe siècle au XVe siècle avec trois courants : le thomisme de saint Thomas d’Aquin, le scotisme de Jean Dun Scott et l’ockhamisme de Guillaume d’Ockham.
L’ambition d’Érasme, appuyée par l’invention récente de l’imprimerie par Gutenberg, est de restaurer la véritable théologie – l’étude de la chose divine – au moyen de la philologie – l’étude des langues et de la littérature.
Loin des complexités argumentatives en vogue au Moyen-Âge, Érasme s’emploie à tracer un chemin de vie chrétienne au plus près du message originel. Présentés dans l’Enchiridion, ces outils pour parvenir à suivre ce chemin sont au nombre de deux : la prière et la science. Peu importe les cérémonies religieuses, la vie monacale ou le célibat, la vie chrétienne s’exprime dans le for intérieur de tous les fidèles.
Érasme le pacifiste devient belliqueux contre le péché et il part en guerre contre lui-même, contre les vices mais non contre son voisin ou un autre peuple.
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