La ligue hanséatique (IIème – XVIIème siècle)
Les comptoirs commerciaux sont des zones d’influence, d’échanges et de domination incontournables durant la conquête du monde par les puissances européennes. Installés en Amérique, en Inde, en Afrique et en Asie, ils forment les bases arrières du développement économique et politique de la France, de l’Angleterre, de l’Espagne, du Portugal, etc…
La toute-puissante Compagnie néerlandaise des Indes orientales en constitue l’exemple le plus marquant car il s’agit de la première société anonyme et est certainement l’une des entreprises les plus puissantes de l’Histoire. Néanmoins, hors des sphères géographiques susmentionnées et avant les grandes découvertes, nous trouvons une ligue commerciale en Europe du nord : la ligue Hanséatique ou Hansa Teutonicorum ayant connu son apogée au XIVème siècle.
Du XIIème au XVIIème siècle, véritable saint empire romain germanique commercial du fait de l’inconsistance de sa structure et du flou des règles instaurées, la Hanse devient un acteur régional incontournable dont l’influence s’étend de Londres à Novgorod. Signataire de traités avec les Etats et les chevaliers teutoniques, elle mène sporadiquement des actions militaires pour préserver ses intérêts. Cette puissance s’illustre avec le traité de Stralsund de 1370 qui accord à la Hanse – représentée par 4 Anciens – un droit de véto sur la succession au trône du Danemark.
Véritable fantôme administratif, sans pouvoir contraignant à l’égard des quelques 70 villes concernées et n’étant dotée d’aucune constitution, la Hanse n’a pas de capital établie et seule la ville de Lübeck assure, dans les esprits d’alors, un rôle central. Malgré tout, l’assemblée générale – le Hansetag – concentre officiellement de nombreux pouvoirs parmi lesquels nous trouvons les ratifications de traités et privilèges commerciaux, les négociations avec villes et souverains étrangers, l’envoi d’ambassades, la paix, la guerre ou les blocus, les mesures financières et militaires, les règlements économiques de toute espèce, l’exclusion ou admission de membres, les arbitrages dans des conflits entre villes hanséatiques.
A partir du XVème siècle, la Hanse est minée de l’intérieur par des contestations grandissantes (ex : demande de réforme constitutionnelle par des conseillers de Lübeck) puis par les réformes religieuses issues du protestantisme fracturant l’unité des populations hanséatiques. Enfin, malgré des réformes au XVIème siècle, la Hanse est victime de la Suède et de la Russie, nouvelles puissances fortes de la Baltique au XVIIème siècle, devant lesquelles toute résistance devient difficile.
Poumon économique septentrional méconnu sous les latitudes françaises, l’organisation hanséatique a su créer un art de vie. Ses architectes ont assemblé des briques reçues des Pays-Bas en respectant l’art gothique ; ils ont créé des places de marché rectangulaires, des hôtels de ville aux pignons ornementés de créneaux et ignorant le beffroi, des doms gigantesques édifiés selon les principes français, quoique la brique y remplace la pierre.
Malgré ses erreurs, la communauté hanséatique a été exemplaire par son esprit d’entreprise, son indifférence aux préoccupations nationales et aux divergences religieuses, et son pacifisme. La Hanse a rejeté les conflits le plus qu’elle l’a pu sans arriver à éviter tous ceux engendrés par ses succès. L’arbitrage et la négociation ont eu une priorité incontestable sur la guerre. C’est là, selon les mots de Philippe Dollinger, « une leçon de sagesse qui peut être méditée avec fruit, aujourd’hui encore ».
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